Dictionnaire (subjectif) de citations |
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AFFAIRES Pour être un homme supérieur en affaires, il n'est pas question d'acquérir des qualités, il ne s'agit que d'en perdre. (Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, GF, III, 9-12) AGE Quarante ans : l'âge implacable, l'âge où nous devenons ce que nous sommes. (Péguy, cité par Clarac dans La Fontaine par lui-même) AIMER Il n'y a qu'une erreur et qu'un malheur au monde, c'est de ne pas savoir assez aimer. (Bernanos, Nous autres Français) AMOUR L'amour .. est un privilège que deux êtres se donnent, de se faire réciproquement beaucoup de chagrin à propos de rien. (Balzac, Les Petits bourgeois) Croyez-moi, quelque amour qui semble vous charmer, On n'aime point, Seigneur, si l'on ne veut aimer. (Racine, Britannicus, III, 1, vers 789-90) APOLOGUE Il se plaisait à rendre la morale sensible par des apologues à la manière orientale ; et cette forme est sûrement celle qui plaît davantage, en éloignant des préceptes le ton de la réprimande. (Mme de Staël, De l'Allemagne, III, 20, GF tome 2, p. 224) ART Mais on peut aimer que le sens du mot art soit : tenter de donner conscience à des hommes de la grandeur qu'ils ignorent en eux. (Malraux, préface au Temps du mépris.) Ne faisait-on pas toujours de l’art comme l’huître fabrique des perles ? Un grain de sable qui se retrouvait coincé sous la coquille de l’huître, sous sa peau, quoi, et voilà que ça l’irritait. Pour finir, l’huître sécrétait quelque chose, exprimait quelque chose de sa propre identité et en enduisait le grain de sable qui jouait les intrus, simplement pour ne plus souffrir. L’huître sécrétait alors, couche après couche, cette substance mystique au point de perdre jusqu’au grain de sable et la douleur qu’il avait provoquée. Suite au soulagement de l’huître, on avait la beauté et le chatoiement de la perle. Et chaque perle, chaque pierre précieuse et lumineuse recelait en son sein un grain d’irritation. (Lawrence Block, Lendemains de terreur, p. 274) AUTOBIOGRAPHIE La vie d'un homme est son image... On peut dire alors ceci que j'entrevois comme une sincérité renversée (de l'artiste) : il doit, non pas raconter sa vie telle qu'il l'a vécue, mais la vivre telle qu'il la racontera. Autrement dit : que le portrait de lui que sera sa vie, s'identifie au portrait idéal qu'il souhaite ; et, plus simplement, qu'il soit tel qu'il se veut. Gide (Journal, 3 janvier 1892) AUTOMNE C’est un matin d’automne acide et vert (Giono, Faust au village, Pléiade V, p. 200) AVIS Il n'est jamais plus urgent de mentir que lorsqu'on vous demande votre avis. (Alexandre Vialatte, Chronique du 30 mars 1969) | |||
BARBARIE Chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage. (Montaigne, Essais, I, 31 "Des cannibales") BEAUTE Mais qu’est-ce que la beauté ? C’est une nouvelle aptitude à vous donner du plaisir. (Stendhal, De L’amour, p. 48) La définition du Beau est facile : il est ce qui désespère. (Valéry, “Lettre sur Mallarmé”, Variété I et II, Folio, p.281) BETISE La bêtise et la sottise diffèrent essentiellement en ceci, que les bêtes se soumettent volontiers à la nature, et que les sots se flattent toujours de dominer la société. (Mme de Staël, De l'Allemagne, GF, tome 1, p. 100) | |||
CENSURE La censure à l'haleine immonde, aux ongles noirs, Cette chienne au front bas qui suit tous les pouvoirs, Vile, et mâchant toujours dans sa gueule souillée, O muse ! quelque pan de ta robe étoilée. (Hugo, Les Chants du crépuscule, XVII, "A Alphonse Rabbe", mort le 31 décembre 1829, ) CINEMA Le cinéma est le voile de Véronique posé sur la souffrance humaine. (André Bazin) [...] c'est cela le travail du cinéma, de nous montrer l'inachevé dans le temporel, l'infini dans l'éphémère. (Le Clézio, Ballaciner, 2007) Le cinéma, c'est la mort au travail. (Jean Cocteau) CITATION J'aime l'usage de nos hommes qui pêchent un verset ancien pour s'expliquer au présent. Ils nouent le jour unique au tapis du temps. (pensée de Marie, personnage de Au nom de la mère, Erri de Luca, Folio, p. 59) CHEF-D'OEUVRE Un livre n'est jamais un chef-d'oeuvre : il le devient. (E. et J. de Goncourt, Journal, 23 juillet 1864) CHEMIN N'allez pas là où le chemin peut mener. Allez là où il n'y a pas de chemin et laissez une trace. (Ralph Waldo Emerson) CLICHÉ Le premier qui compara la femme à une rose était un poète ; le deuxième était un imbécile ; ... et le troisième était un classique ! (Nerval, Caillois, Borges) CLASSICISME Le classicisme n’est que la corde la plus tendue du baroque. (Henri Maldiney, cité par Ponge dans Pour un Malherbe, p. 172) CONDUITE C'est beaucoup pour les hommes d'avoir des phrases à dire en faveur de leur conduite : ils s'en servent d'abord pour tromper les autres, et finissent par se tromper eux-mêmes. (Mme de Staël, De l'Allemagne, III, 16, p. 208 tome 2, GF) CONNAISSANCE C'est ce que personne ne sait sur vous qui vous permet de vous connaître vous-même. (Don DeLillo, Point Oméga, p.81, Actes-sud, 2010) CONNERIE Comme il y en a beaucoup, le plus grand nombre, qui n'ont pas assisté à mes premiers séminaires, je me permettrai de rappeler ceci que, dans mes toutes premières adresses à ce que je dois bien appeler mon public, j'ai averti que la psychanalyse est un remède contre l'ignorance ; elle est sans effet sur la connerie. C’est véritablement là quelque chose de fondamental. Nous n’apportons nulle sagesse ; nous n’avons rien à révéler. C’est à nous en tant qu’analyste qu’il se révèle quelque chose, quelque chose qui a ses limites. Et la limite qu’impose la connerie, comme je viens de le dire, nous ne la franchirons pas » (Lettre de l’École Freudienne, 1975, n° 15, p. 235). La chasse aux cons est un safari sans espoir (Frédéric Dard, cité dans Lire, mai 2010) CONSCIENCE Je pense qu’il a ce que quelques gars à terre appellent une conscience ; c’est une sorte de tic douloureux à ce qu’ils disent, pire qu’une rage de dents. Eh bien! eh bien! je ne sais pas ce que c’est mais Dieu me garde de l’attraper. (Herman Melville, Moby Dick, GF, p. 165) CONVAINCRE On peut convaincre les autres par ses propres raisons, mais on ne les persuade que par les leurs. (Joubert, Pensées, essais et maximes, Gosselin, Paris, 1842, p. 317). CREER C'est qu'il faut un chaos à qui veut faire un monde. (Hugo, Odes et ballades, III, 8) CULTURE C’est ça la culture : c’est tout ce que l’homme a inventé pour rendre le monde vivable et la mort affrontable. (Aimé Césaire, interview, Lire, juin 2004) | |||
DEVOIR C'est le devoir qui crée le droit, et non le droit qui crée le devoir. (Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, III, 2e époque, 12, 9) DIDEROT Des idées qui se sont enivrées et qui se sont mises à courir les unes après les autres. (Marquis de Chastellux, cité par Badinter, Les Passions intellectuelles, II, p. 136) DIEU L'homme a inventé Dieu pour ne pas se suicider. (Machiavel) L'homme a inventé Dieu pour se délivrer de ses angoisses. (Kafka) Si Dieu existe, j'espère qu'il a une bonne excuse. (Woody Allen) DUREE Exegi monumentum aere perennius (Horace, "J'ai érigé un monument plus durable que l'airain", cité et traduit par Mme de Staël, De l'Allemagne, GF, tome 1, p. 179) Nomenque erit indelebile nostrum (Horace, "le souvenir de mon nom sera ineffaçable", cité et traduit par Mme de Staël, De l'Allemagne, GF, tome 1, p. 179) | |||
ECRIRE Bien sûr qu’ils vont compter tes adverbes, tes malgré que, et mesurer la taille de tes ellipses... C’est leur métier... Mais toi, tu n’es pas en train de te couper une robe de soirée, tu écris un livre...! Ne t’occupe pas de ce qu’on écrit sur toi, que ce soit bon ou mauvais. Evite les endroits où l’on parle des livres. N’écoute personne. Si quelqu’un se penche sur ton épaule, bondis et frappe-le au visage. Ne tiens pas de discours sur ton travail, il n’y a rien à en dire. Ne te demande pas pourquoi ni pour qui tu écris mais pense que chacune de tes phrases pourrait être la dernière. (Djian, explicit de Lent dehors, 1991) Ecrire! oh! Ecrire, c’est s’emparer du monde, de ses préjugés, de ses vertus et le résumer dans un livre; c’est sentir sa pensée naître, grandir, vivre, se dresser debout sur son piédestal, et y rester toujours. (Flaubert, Un parfum à sentir, 1836) Ecrire c'est mettre en ordre ses obsessions. (Jean Grenier) ECRIVAIN Un écrivain est la somme de toutes ses lectures. (Paule Constant, Lycée Pasteur, septembre 2002) Tout écrivain digne de ce nom donne à son époque une image choisie à la fois véritable et poétique, durable et irrisée [...] (Raymond Queneau, préface au Chant de l'équipage, McOrlan, Folio, p. 24) EDUQUER Eduquer c’est rappeler le vrai prix des êtres et des choses que l’ignorance ne voit pas et que l’amour propre ne peut pas voir. (Fumaroli, Le Poète et le roi, p. 411) ENFER Enfer chrétien, du feu. Enfer païen, du feu. Enfer mahométan, du feu. Enfer hindou, des flammes. A en croire les religions, Dieu est né rôtisseur. (Victor Hugo, Choses vues) ENNUI L'ennui est l'oiseau de rêve qui couve l'oeuf de l'expérience. Au moindre bruit dans le feuillage, l'oiseau s'envole. (Walter Benjamin, "Le conteur", Oeuvres III, Folio eesais, p. 126) ENVIE On ne tourmente pas les arbres stériles ou desséchés; ceux-là seulement sont battus de pierres dont le front est couronné de fruits d'or. (Hugo, Odes et Ballades, III, 2, épigraphe) ERREUR Présentée sous forme mathématique l'erreur acquiert un grand prestige. Le sceptique le plus endurci attribue volontiers aux équations de mystérieuses valeurs. (Gustave Le Bon) ETE Alors des profondeurs du sol, où l'argile se cuit à feu couvert, jusqu'aux hauteurs du ciel où montent, aspirées, les molécules flamboyantes des poussières, s'élève l'édifice immense de l'été. (Henri Bosco, Le Mas Théotime) EVOLUTION N'est-il pas infiniment plus honorable de descendre d'un singe parfectionné que d'un ange déchu ? (Marcellin Boule, Le Matin, 26/12/1908) | |||
FINIR Quand on a dix pas à faire, neuf c'est la moitié du chemin. (proverbe chinois, cité par Mme de Staël dans De l'Allemagne, II, XXI, p. 332, tome 1, GF) FRANÇAIS (langue) Mesuré à l'aune de la 'correction', le français n'est à tout prendre qu'une immense faute de latin. (Daniel Péchoin, avant-propos du Dictionnaire des difficultés du français, Larousse). | |||
GENIE Le Génie
est un Christ :
méconnu, persécuté, battu de verges,
couronné d'épines, mis en croix pour et par les
hommes,
il meurt en leur laissant la lumière, et ressuscite
adoré. (Chateaubriand, Mémoires
d'Outre tombe, IV, 8, 3. A propos du Tasse)
Tout ce que trouvent les gens de génie [...] est si simple que chacun croit qu'il l'aurait trouvé. Mais [...] le génie a cela de beau qu'il ressemble à tout le monde et que personne ne lui ressemble. (Balzac, Le Curé de campagne) | |||
HARMONIE L’harmonie suprême est coïncidence de contraires. Tout se fait, tout se défait par la discorde. (Heraclite, cité par Lacarrière, L’Eté grec, p. 11) HISTOIRE Les historiens sont les policiers et les juges d’instruction du passé. (Jean Botéro) L’histoire a été inventée pour nous prouver l’inutilité des exemples qu’elle donne. (Schlegel en 1838, cité par Dumas dans le 1er tome de ses Mémoires) Mais chacun est libre de regarder l'histoire à sa façon, puisque l'histoire n'est que la réflexion du présent sur le passé, et voilà pourquoi elle est toujours à refaire..." (Flaubert, lettre à Edma des Genettes, novembre 1864) HOMME [...] pour remplir toute sa taille l’homme doit viser au surhomme. La vache ne se dresse sur ses pattes que parce que le ratelier est placé assez haut. (Alexandre Vialatte, Chroniques de La Montagne, 22 septembre 1953) Les Hommes sont comme les abeilles. Leurs produits valent mieux qu'eux. (Maxime de Maykosen, un des journalistes des Hommes de bonne volonté, dans Prélude à Verdun, Jules Romains, 1938) Homo sum, humani a me nihil alienum puto (Térence, poète comique latin, 194-159 AC = “Je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger".) Chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition. (Montaigne, Essais, III, 2, p. 782, Pléiade) L’homme est cet animal séparé, ce bizarre être vivant qui s’est opposé à tous les autres, qui s’élève sur tous les autres, par ses... songes, - par l’intensité, l’enchaînement, par la diversité de ses songes! (Paul Valéry, Variété I, p. 32) Une issue, ça s'invente. Et chacun, en inventant sa propre issue, s'invente soi-même. L'homme est à inventer chaque jour. (Sartre, Qu'est-ce que la littérature ?, p. 290) L'homme est périssable, il se peut. Mais périssons en résistant et si le néant nous est réservé, faisons que ce soit une injustice. (Senancour, Obermann, cité par Camus dans Lettres à un ami alllemand) Borné dans sa nature, infini dans ses voeux, L'homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux. (Lamartine, Méditations poétiques) Le matin, j'émerge de mes rêves, le plus heureux des anges [...] Je me couche le soir, un vrai salaud. Qu'ai-je fait entre temps ? J'ai fréquenté les hommes. (Abdulah Sidran, Sarajevo, 1993) HUMOUR Cette panique raisonnée qui s'appelle l'humour (Raymond Bellour, Henri Michaux, Folio essais, 1966, p. 334) | |||
IGNORANCE Qui veut guérir de l'ignorance, il faut la confesser. (Montaigne, Essais, III, 11) ILLUSION ... tout ce que l'on appelle des illusions, c'est-à-dire le dévouement et l'enthousiasme. (Mme de Staël, De l'Allemagne, GF, tome 1, p. 81) Rien de ce qui rend heureux n'est illusion. (Goethe, phrase préférée de Jules Verne qui la cite dans sa correspondance à sa famille) IMAGINATION Tout ce qu'on imagine est réel : il n'y a même que cela qui soit réel. (Anatole France, Le Livre de mon ami) Tout ce qu'on invente est vrai, [...]. La poésie est une chose aussi précise que la géométrie. (Flaubert, lettre à Louise Colet, 14 août 1853) IMPOSSIBLE On commence par dire : cela est impossible pour se dispenser de le tenter, et cela devient impossible, en effet, parce qu'on ne le tente pas. (Charles Fourier) L'impossible est une mauvaise volonté travestie en destin. (V. Jankélévitch, La Mort, éd. Champ-Flammarion, p. 175) INCERTITUDE Tout voir et tout comprendre est une grande raison d'incertitude. (Mme de Staël, De l'Allemagne, GF, tome 1, p. 64) INCONSTANCE Le monde n’est qu’une branloire perenne. Toutes choses y branlent sans cesse : la terre, les rochers du Caucase, les pyramides d’Egypte, et du branle public et du leur. La constance même n’est qu’un branle plus languissant. (Montaigne, Essais, III, 2, Pléiade, p. 782) INFINI Il n'y a que deux infinis : l'univers et la bêtise humaine. Et encore, en ce qui concerne l'univers, je n'ai pas de certitude. (Einstein) INTELLIGENCE L'avantage de l'intelligence est de permettre de jouer à l'imbécile. L'inverse est déjà plus difficile. (Kurt Tucholsky) IRONIE La gaieté de l'indignation (Léon Bloy) IVRESSE Quand on lichetrogne, y a fatalement un glass qui plaide la cause de la couennerie. (San Antonio, Le Fil à couper le beurre, 1955) | |||
JARDIN
Si tu as un jardin non loin d'une bibliothèque, tu ne manques de rien. (Cicéron, Lettre 451 à Varron) JEUNESSE La jeunesse [...] c’est la joie. Et, la jeunesse, [...] c’est la passion pour l’inutile. (Giono, Que ma joie demeure, p. 438) Il ne faut pas renier sa jeunesse. L'homme mûr ne fait qu'exécuter les rêves du jeune homme. 'Toute belle oeuvre est un germe planté en avril qui s'épanouira en octobre. (Théophile Gautier, Histoire du romantisme, 1874) La jeunesse prophétise par son existence même, étant ce qui sera. (Valéry, discours de réception à l'Académie française) | |||
LECTURE Le duc de Vivonne, frère de la marquise de Montespan "était aussi un des hommes de la cour qui avaient le plus de goût et de lecture. C'était lui à qui le roi disait un jour : "Mais à quoi sert de lire ?" Le duc de Vivonne, qui avait de l'embompoint et de belles couleurs, répondit : "la lecture fait à l'esprit ce que vos perdrix font à mes joues." (Voltaire, Le Siècle de Louis XIV, GF, tome 1, p. 336) L’étude a été pour moi le souverain remède contre les dégoûts de la vie, n’ayant jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture ne m’ait ôté. (Montesquieu, Cahiers.) Quand une lecture vous élève l’esprit, et qu’elle vous inspire des sentiments nobles et courageux, ne cherchez pas une autre règle pour juger l’ouvrage ; il est bon et fait de main d’ouvrier. (La Bruyère, Les Caractères, I, 31) Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux. (Jules Renard, Journal, 23 juin 1902) Tant qu'on a encore un livre sous la main et le loisir de la lecture, une situation ne peut être désespérée ni tout à fait dépourvue de liberté. (Ernst Jünger, La Cabane dans la vigne, 24 juillet 1945) LIBERTE Ô Liberté, que de crimes ont été commis en ton nom ! (mots attribués à Madame Roland, guillotinée en septembre 1793) LIRE Lire, c’est sous bien des rapports [...] dialoguer avec soi-même. (1995, Hella Haase, Une liaison dangereuse, Pts-Seuil, p. 90) Il ne faut pas dire qu'on relit les chefs-d'oeuvre, car il semble toujours qu'on ne les a jamais lus. (Jules Renard, Journal, 9 août 1900) LITTERATURE Par les lettres, les hommes se dépassent autant eux-mêmes que l’humanité est supérieure à l’animalité. (Cicéron traduit par Boissard et cité par Fumaroli, Le poète et le roi, p. 60) Ce qui vient au monde pour ne rien troubler Ne mérite ni égards ni patience. (René Char) Aimer la littérature, c’est refuser de prendre la vie comme elle est, les choses comme elles sont, les événements comme ils viennent et les calamités comme elles sont. Aimer la littérature, ce n’est pas vouloir seulement comprendre les hommes, mais aussi les transformer et se transformer. (Claude Roy, Le Commerce des classiques, 1953, pp. 15-16) Elever l'homme au-dessus de lui-même, le délivrer de sa pesanteur, l'aider à se surpasser, en l'exaltant, le rassurant, l'avertissant, le modérant, n'est-ce pas là le but secret de la Littérature ? (A. Gide, Feuillet d'automne, p. 220). Je ne veux pas qu'on me plaise, je veux qu'on m'instruise. (Voltaire, Micromegas.) La littérature, comme toute forme d'art, est l'aveu que la vie ne suffit pas. (Fernando Pessoa, Fragments d'un voyage immobile, choisis et traduits du portugais par Rémy Hourcade) Un des instruments de la conscience de soi d'une société. (Italo Calvino, La Machine Littérature) La littérature n'est peut-être rien d'autre qu'un bon usage des catastrophes. (Jean d'Omesson, Le Vagabond qui passe sous une ombrelle trouée) LIVRE Il n'y a pas de livre si mauvais qu'on ne puisse en tirer quelque profit. (Pline l'Ancien cité par Pline le Jeune) Un livre est un miroir. Quand un singe s'y regarde, l'image réfléchie n'est pas celle d'un apôtre. (Lichtenberg, cité par Harrison dans Forêts. Essai sur l'imaginaire occidental) C’est un métier que de faire un livre, comme de faire une pendule : il faut plus que de l’esprit pour être auteur. (La Bruyère, Les Caractères, “Des ouvrages de l’esprit”) Les livres ne remuent pas le monde, mais ils le conduisent secrètement. (Senancour, De l'amour) Les livres sont des miroirs, et l'on n'y voit que ce que l'on porte en soi-même. (Carlos Ruiz Zafon, L'ombre du vent, p. 277) Il me semble d’ailleurs qu’on ne devrait lire que les livres qui vous mordent et vous piquent. Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d’un coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire? Pour qu'il nous rende heureux comme tu l'écris ? Mon Dieu, nous serions aussi heureux si nous n'avions pas de livres, et des livres qui nous rendent heureux, nous pourrions à la rigueur en écrire nous-mêmes. En revanche nous avons besoin de livres qui agissent sur nous comme un malheur dont nous souffririons beaucoup, comme la mort de quelqu'un que nous aimerions plus que nous-mêmes, comme si nous étions proscrits, condamnés à vivre dans des forêts loin de tous les hommes, comme un suicide — un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. (Franz Kafka, lettre à Oskar Pollak, 27 janvier 1904, traduction Marthe Robert) Là où on brûle des livres, on finit aussi par brûler des hommes (Heinrich Heine, cité par Florence Baltique, De la séduction littéraire, 2009) Un livre est, selon Littré, la réunion de plusieurs cahiers de pages manuscrites ou imprimées. [...] Je définirais le livre une oeuvre de sorcellerie d'où s'échappent toutes sortes d'images qui troublent les esprits et changent les coeurs. Je dirais mieux encore : le livre est un petit appareil magique qui nous transporte au milieu des images du passé ou parmi des ombres surnaturelles. Ceux qui lisent beaucoup de livres sont comme les mangeurs de haschisch. Ils vivent dans un rêve. [...] Le livre est l'opium de l'occident. Il nous dévore. Un jour viendra où nous serons tous bibliothécaires, et ce sera fini. (Anatole France, introduction à La Vie littéraire, 1888) LUXE Le luxe me paraît donc la ressource des gens bêtes. (George Sand, Histoire de ma vie, tome 1, Pléiade, p. 666) LYRISME La poésie lyrique est une forteresse de mémoire. (Kundera, Le Rideau, NRF, p. 177) | |||
MEDIOCRITE Dans les petits esprits, le vice même est mesquin. (George Sand, Histoire de ma vie, tome 1, p. 645) MEMOIRE "La mémoire est dans le coeur" (Lettre du 9 septembre 1671) ou dit le comte des Chapelles "le coeur est dans la mémoire." (Mme de Sévigné, p. 340- 341, Pléiade, tome 1) J'ai une mémoire admirable : j'oublie tout ! C'est d'un commode !... C'est comme si le monde se renouvelait pour moi à chaque instant. (Jules Renard, Journal, 8 avril 1907) MENSONGE Tout mensonge répété devient une vérité : on ne saurait avoir trop de mépris pour les opinions humaines. (Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, III, 3, 2) MEPRIS Il y a des temps où l'on ne doit dépenser le mépris qu'avec économie, à cause du grand nombre de nécessiteux [...] (Chateaubriand, Mémoires d'Outre-tombe, III, 5,1) MER Une ligne de sable, un renflement de dune, Une frange d'écume et de varech : la mer... (Mauriac, Le Sang d'Atys) MIROIR Un miroir est un alambic de vanité et en même temps un stérilisateur d'orgueil. (Natsume Sôseki, Je suis un chat, chap. 9) MODERNES Ils se croient le seul passé auquel le futur ait droit. (Fumaroli, Le Poète et le roi, p. 293) MORT Et, chassant devant lui, dans l’affreux chemin noir, Leur conscience nue et leur âme sans voiles, L’ange fouette les morts avec son fouet d’étoiles. (V.Hugo, Dieu, Poésie IV, Bouquins, p. 592) La mort n'est rien pour nous : aussi longtemps que je suis là, elle n'y est pas ; et quand elle est là, je n'y suis plus. (Epicure, "A Ménécée", cité par Jerphagnon, Les Dieux et les mots, p. 204) La mort, j'ai bien réfléchi, je suis contre. (Woody Allen) MOTS Il nous faut peu de mots pour exprimer l'essentiel ; il nous faut tous les mots pour le rendre réel. (Paul Eluard, Avenir de la poésie, repris dans Donner à voir) MOURIR Ce n’est rien de mourir, c’est affreux de ne pas vivre. (Jean Valjean dans Les Misérables, Hugo) Le plus grand bienfait de la mort, l'avantage de ne plus mourir. (Lucain, La Pharsale, chant VI, traduction Marmontelle) MYTHE Taûta dè egéneto mèn oudépote, esti dà aeí = “cela ne s’est jamais passé, mais cela se passe toujours.” (Sallustius) Le mythe n'est pas l'histoire mais la forme métaphorique d'une vérité qui la traverse. (Paul Ricoeur) [...] un mythe n’est pas un événement incroyable mais un événement auquel on ne peut éviter de croire. (Jean Paulhan, Discours de réception à l'Académie française) O mito é o nada que é tudo [Le mythe est le rien qui est tout] (Fernando Pessoa, "Ulysses" in Mesagem, 1934) | |||
OPINION Toute opinion est une autobiographie métamorphosée. (Cyrulnick, dans Lire, novembre 2003) ORGUEIL Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul ! (E. Rostand, Cyrano de Bergerac, II, 8) “Je me les sers, moi-même, avec assez de verve, Mais je ne permets pas qu’un autre me les serve.” (E. Rostand, Cyrano de Bergerac, I, 4) ORIGINALITE L'écrivain original n'est pas celui qui n'imite personne, mais celui que personne ne peut imiter. (Chateaubriand, Le Génie du christianisme, Pléiade, p. 637) Le plagiaire se nourrit moins des autres que le non plagiaire ; car il en rend des morceaux reconnaissables. L'original digère mieux. (Valéry, Cahier 85, 1918) OUBLI L'oubli, nuit sombre où va tout ce qui tombe... (Hugo, Les Chants du crépuscule, III) L'oubli n'est pas autre chose qu'un palimpseste. Qu'un accident survienne, et tous les effacements revivent dans les interlignes de la mémoire étonnée. (Hugo, L'Homme qui rit, II,IV, I) | |||
PARADIS Les vrais paradis sont les paradis qu'on a perdus. (Proust cité par Clarac dans La Fontaine par lui-même, p. 53) PARLER
Quand on ne parle pas des choses avec une partialité amoureuse, ce qu’on en dit ne vaut pas la peine d’être rapporté. (Goethe cité par A. Vialatte) PEUPLE Qu'est-ce qu'une insurrection ? C'est le peuple en armes. Quest-ce que le peuple ? C'est ce qui dans une nation ne veut jamais s'agenouiller. (Camus, éditorial de Combat du 21 août 1944) POESIE La poésie est cette démarche qui par le mot, l'image, le mythe, l'amour et l'humour m'installe au coeur vivant de moi-même et du monde. (Aimé Césaire, L'Art poétique, 1959) La poésie partant de la terre, c'est le premier millimètre d'air au-dessus d'elle. (Marina Tsvetaeva, 1892-1941, citée par Fabrice Midal, Pourquoi la poésie. L'héritage d'Orphée) L'idée, trempée dans le vers, prend soudain quelque chose de plus incisif et de plus éclatant. C'est le fer qui devient acier. (Victor Hugo, Préface de Cromwell) Il y a autant de différence entre un Poète et un versificateur qu'entre un bidet et un généreux coursier de Naples. (Pierre de Ronsard, La Franciade) La poésie, c’est ce qu’on rêve, ce qu’on imagine, ce qu’on désire et ce qui arrive, souvent. La poésie est partout comme Dieu n’est nulle part. La poésie, c’est un des plus vrais, un des plus utiles surnoms de la vie (Prévert, Hebdromadaires, cité dans Jacques Prévert, un poète, p. 24) La poésie est l’ambition d’un discours qui soit chargé de plus de sens et mêlé de plus de musique, que le langage ordinaire n’en porte et n’en peut porter. (Valéry, “Passage de Verlaine”, Variété I et II, Folio, p. 255-56) La poésie, c'est tout ce qu'il y a d'intime en tout. (Victor Hugo, préface des Odes) C'est notre sanctuaire intime que le poète enrichit d'idées neuves, féeriques et plaisantes. Il sait toucher à notre gré les forces secrètes de notre âme et nous révèle à l'aide de mots tout un monde inconnu et grandiose. Comme s'ils sortaient de grottes profondes, voici se lever en nos esprits les siècles passés et à venir, les hommes sans nombre, les contrées merveilleuses ainsi que les événements les plus extraordinaires, et ils viennent nous arracher à la banalité du présent. On entend un langage inconnu et l'on sait pourtant ce qu'il signifie. C'est un véritable pouvoir magique qu'exercent les paroles des poètes ; les mots les plus connus y prennent une sonorité exquise et enivrent les auditeurs de leur charme captivant. (Novalis, Henri d'Ofterdingen, GF, p. 91-92) POETE Poète, c'est-à-dire un passeur du langage. (Meschonnic, Pour la poétique IV, Ecrire Hugo, NRF, p. 65) Les poètes sont des oiseaux : tout bruit les fait chanter. (Chateaubriand, Mémoires d'outre tombe, III) Individu normal qui a la faculté de créer des états anormaux. (Mario de Andrade, à propos de Cendrars, 1925) POUVOIR Les hommes ne sont impuissants que lorsqu'ils admettent qu'ils le sont. (Jean-Paul Sartre) Tout pouvoir est devoir (Victor Hugo, William Shakespeare, II, 6, 4) PRIX Aujourd'hui les gens savent le prix de tout mais ne connaissent la valeur de rien. (Lord Henry Wotton, Le Portrait de Dorian Gray, Oscar Wilde) PROGRES Qu'est-ce que le progrès ? un lumineux désastre. (V. Hugo, Dieu) PROVERBE Le proverbe est le cheval de la parole, quand la parole se perd, c’est grâce au proverbe qu’on la retrouve. (Ahmadou Kourouma, En attendant le vote des bêtes sauvages, 1998, Pts seuil, p. 42) | |||
RAISON ...on ne trouve ses propres raisons que face à la déraison des autres. (Vercors, Les Animaux dénaturés, p. 350) RESPONSABILITE On est toujours responsable de ce qu'on n'essaie pas d'empêcher. (Sartre, Qu'est-ce que la littérature ?, folio-essais, p. 286) RÊVE La sagesse, c'est d'avoir des rêves suffisamment grands pour ne pas les perdre de vue lorsqu'on les poursuit. (Oscar Wilde) RICHESSE Il faut compter ses richesses par les moyens qu’on a de satisfaire ses désirs. (L’Abbé Prévost, Manon Lescaut, début de la 2e partie) RIRE
Mieux est de ris que de larmes escrire, Pource que rire est le propre de l'homme. (Rabelais, Gargantua, Droz-Minard, p.7) Je me presse de rire de tout, de peur d'être obligé d'en pleurer. (Figaro dans Le Barbier de Séville, I, 2, Beaumarchais) ROMAN Le roman est une géographie de l'infini (Romain Gary, Pour Sganarelle) “Il en est qui pensent qu’un roman doit tout expliquer. Que le roman doit être le réparateur de la vie et de ses incohérences. La vie a-t-elle déjà été cohérente ? Et ils pensent donc que l’écrivain occupe cette place centrale dans l’espace et le temps qui lui permet de donner le départ et de décréter la fin des histoires (vous connaissez, vous, une histoire avec ce qu’on appelle une fin, une vraie fin, une fin des fins ?), de relier les fils, de boucher les trous, de dissiper le brouillard ; d’expliquer le comportement des personnages. Il en est qui croient que le roman a une mission d’information et une vocation pédagogique. Rien n’est plus éloigné de la vérité. Le roman n’est pas là pour mettre de l’ordre dans le chaos. Le roman se fout de l’ordre. Le roman n’est pas né pour plaire aux amoureux de l’ordre. Il est là pour distraire par le vertige, pour mettre le bordel, pour en jouir, pour le remuer. Il ne s’agit pas de répondre à des questions mais d’en poser encore et encore de nouvelles, plus inquiétantes. Le roman comme la réalité vraie, comme les histoires que nous connaissons tous, est rempli de parenthèses, de trous d’aiguilles, d’ellipses qui dansent d’un côté à l’autre sans se résoudre à passer à l’action, sans envie de s’expliquer. Je crois être au-delà de l’illusion qui prétend que lorsque la vie devient profondément incohérente, le roman est là pour la réparer. D’un autre côté, nous aurions tort de trop nous plaindre. Le roman est certainement le borgne de ce lumineux désert où abondent les aveugles.” (Nous revenons comme des ombres, Taibo II, 2002, p. 312-313) Dans le monde
moderne abandonné par la
philosophie, fractionné par des centaines de
spécialisations scientifiques, le roman nous reste comme le
dernier observatoire d'où l'on puisse embrasser la vie
humaine
comme un tout. (Milan Kundera, Le
Rideau, p. 101, réflexion qu'il attribue
à Ernesto Sabato)
Le roman fait pour ainsi dire la transition entre la vie réelle et la vie imaginaire. L'histoire de chacun est, à quelques modifications près, un roman assez semblable à ceux que l'on imprime, et les souvenirs personnels tiennent souvent à cet égard lieu d'invention. (Mme de Staël, De l'Allemagne, II, 28, tome 2, GF, p. 41) Lire un roman n'est pas se retirer du monde, c'est entrer dans le monde par une autre porte (Bernard Pivot, tweet, 29 septembre 2014) Pour moi, c'est une grande fonction du roman que d'être un laboratoire de l'histoire. (Anne-Marie Garat, Le Monde, 12/05/2006) Roman : nouvelle considérablement boursouflée. (Ambrose Pierce) C'est une histoire. Et les histoires sont écrites pour les empêcher d'advenir dans la vie. (Fred Vargas, Dans les bois éternels, p. 206) La grande forme de la prose où l'auteur, à travers des egos expérimentaux (les personnages), examine jusqu'au bout quelques thèmes de l'existence. (Milan Kundera, L'Art du roman, folio, p. 175) | |||
SCIENCE Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. (Rabelais, Pantagruel, chapitre VIII) sculpture consiste à prendre un bloc de marbre et à enlever tout ce qui est inutlle. (San Antonio, C'est mort et ça ne sait pas, 1955) SECRET Un secret, quel qu'il soit, flatte l'amour-propre des hommes ; et quand on leur dit qu'ils sont de quelque chose dont leurs pareils ne sont pas, on acquiert toujours de l'empire sur eux. L'amour-propre se blesse de ressembler à la multitude ; et dès qu'on veut donner des marques de distinction connues ou cachées, on est sûr de mettre en mouvement l'imagination de la vanité, la plus active de toutes. (Mme de Staël, De l'Allemagne, IV, 8, GF, tome 2, p. 289) SENSIBILITE De ce que l'on manque de raison, il ne s'ensuit pas du tout qu'on ait de la sensibilité : la folie n'est souvent qu'un égoïsme impétueux. (Mme de Staël, De l'Allemagne, II, 17, p. 268 GF, tome 1) L'on donne trop d'avantage aux caractères arides et froids quand on leur présente la sensibilité comme une maladie, tandis que c'est de toutes les facultés morales la plus énergique, puisqu'elle donne le désir et la puissance de se dévouer aux autres (Mme de Staël, De l'Allemagne, II, 28, p. 52 GF, tome 2) SERVITUDE L'impuissance de l'homme à se gouverner et à contenir ses sentiments, je l'appelle servitude. En effet, l'homme soumis aux sentiments ne dépend pas de lui-même, mais de la fortune, dont le pouvoir sur lui est tel qu'il est souvent contraint de faire le pire, même s'il voit le meilleur." (Spinoza, cité par Audeguy, Petit éloge de la douceur, p. 51) SOCIETE Les faits sociaux doivent être étudiés comme des choses, c'est-à-dire comme des réalités extérieures à l'individu (Emile Durkheim, préface au Suicide. Etude de sociologie, 1897) | |||
TALENT Le talent, c'est la sobriété du génie (George Sand, rapporté par Marc Monnier, L'Italie est-elle la terre des morts ?, 1860) TEMPS Le temps se venge toujours de ce qu’on fait sans lui. (proverbe) Le temps ne retient rien de ce qui est fait sans lui. (proverbe sénégalais) Quand tu te hâtes, c’est le diable qui te pousse. (Idriss Shah) Le temps des hommes est de l'éternité pliée (Cocteau, La Machine infernale, 1934) version Yourcenar : "Le temps, c'est de l'éternité pliée." THEATRE
Le théâtre n'est pas le pays du réel : il y a des arbres de carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous terre. C'est le pays du vrai... Victor Hugo (Tas de pierres III, 1830-1833) Le naturel, le vrai, celui du théâtre, est la chose la moins naturelle du monde […]. N’allez pas croire qu’il suffit de retrouver le ton de la vie. D’abord dans la vie le texte est toujours si mauvais ! Nous vivons dans un monde qui a complètement perdu l’usage du point-virgule, nous parlons tous par phrases inachevées, avec trois petits points sous-entendus, parce que nous ne trouvons jamais le mot juste. Et puis le naturel de la conversation, que les comédiens prétendent retrouver : ces balbutiements, ces hoquets, ces hésitations, ces bavures, ce n’est vraiment pas la peine de réunir cinq ou six cents personnes dans une salle et de leur demander de l’argent pour leur en donner le spectacle. Ils adorent cela, je le sais, ils s’y reconnaissent. Il n’empêche qu’il faut écrire et jouer la comédie mieux qu’eux. C’est joli la vie, mais cela n’a pas de forme. L’art a pour objet de lui en donner une précisément et de faire, par tous les artifices possibles — plus vrai que le vrai. (Anouilh, La Répétition ou l’amour puni, p.46) TRAVAIL "le travail a été ce que l'homme a trouvé de mieux pour ne rien faire de sa vie." (Raoul Vaneighem) | |||
UNANIMITÉ
Dans l'empire de la littérature, comme dans beaucoup d'autres, l'unanimité est presque toujours un signe de servitude. (Mme de Staël, De l'Allemagne, II, XXV, p. 16 tome 2, GF) UTOPIE Une utopie est un berceau. (Victor Hugo, "Fonction du poète", Les Rayons et les ombres.) | |||
VAINCRE A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire” (Corneille) VIE Un "banquet d'absynthe et de miel" (V. Hugo, Odes et ballades, IV, 4) Vivre est une chanson dont mourir est le refrain. (V. Hugo, William Shakespeare, 1864) La vie est désespérée, mais elle n’est pas grave. (manière de proverbe austro-hongrois, cf. Watzlawick) La vie est un roman que chacun de nous porte en soi, passé et avenir. (George Sand, Histoire de ma vie, tome 1, p. 174) Qu’est-ce qu’une grande vie, sinon une pensée de la jeunesse exécutée par l’âge mûr ? (Vigny, Cinq-Mars, p. 272) Une vie c'est une
enfance mise à toutes les sauces. (Sartre, L'Idiot de la famille,
p. 35)
La vie d'un homme est son image... On peut dire alors ceci que j'entrevois comme une sincérité renversée (de l'artiste) : il doit, non pas raconter sa vie telle qu'il l'a vécue, mais la vivre telle qu'il la racontera. Autrement dit : que le portrait de lui que sera sa vie, s'identifie au portrait idéal qu'il souhaite ; et, plus simplement, qu'il soit tel qu'il se veut. (Gide, Journal, 3 janvier 1892) Ne va pas, ô mon âme, désirer une vie sans fin, mais épuise le champ du possible. (Pindare, 3e Pythique, cité par Jerphagnon, Les Dieux et les mots, p. 183) Nous naissons tous multiples, la vie se charge de nous simplifier. (Pierre Clarac, La Fontaine par lui-même, Seuil, p. 105) Car il n'est si beau jour qui ne mène à sa nuit. (rapporté par Chateaubriand, Mémoires d'outre tombe, IV, 8, 6, comme trouvé en épitaphe sur la tombe d'Arminius d'Orbesan, à Padoue) Ainsi tout passe : l'homme au bord de l'abîme est réduit à compter les minutes qui tombent goutte à goutte dans l'Eternité. (Chateaubriand, Mémoires d'outre tombe, IV, 10, 6) La vie n'est qu'un fantôme errant, un pauvre comédien qui se pavane et s'agite durant son heure sur la scène et qu'ensuite on n'entend plus ; c'est une histoire dite par un idiot, pleine de fracas et de furie, et qui ne signifie rien. (Shakespeare, Macbeth, V, 5 ; traduction de F.-V. Hugo) Réécrite par Victor Hugo : "[...] que fait l'homme ici bas ? / Un peu de bruit dans beaucoup d'ombre." (Les Rayons et les ombres, IX, "A M Fanny de P".) Qu'est-ce que la vie ? L'usufruit d'une agrégation de molécules. (E. & J. Goncourt, Journal, 22 août 1862) J'ai appris aussi qu'une vie ne vaut rien, mais que rien ne vaut une vie (dit Garine dans Les Conquérants, Malraux) VILLE Il y a, dans le pays où je vis, une ville qui ne ressemble à nulle autre. (Pierrette Fleutiaux, incipit de Des phrases courtes, ma chérie!) VIVRE Vivre ce n’est pas respirer, c’est agir. (Rousseau, L’Emile, p. 43) Ceux qui vivent ce sont ceux qui luttent (Hugo, Châtiments) Vivre c'est s'obstiner à achever un souvenir (René Char) VOYAGE Les vrais voyages sont ceux que les enfants seuls peuvent entreprendre, c'est-à-dire les voyages imaginaires. (Raymond Queneau, préface au Chant de l'équipage, Mac Orlan, p. 19) |