Les registres

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 La notion de REGISTRE est un "outil d'analyse" utilisé pour rendre compte de l'écriture d'un texte. Il ne faut pas la confondre avec celle de "registre de langue".
Un registre de langue désigne le type de langage employé dans un texte : familier (qui n'emploie pas, par exemple, les deux termes de la négation ; qui emploie parfois des mots d'argot...) ; standard ou courant (conforme aux règles établies par les grammaires) ; littéraire ou soutenu (qui respecte,  par exemple, les concordances des temps en employant le subjonctif imparfait quand il faut ; qui choisit des mots plus rares...).
Le REGISTRE, en emploi absolu, se définit à partir des effets produits sur le lecteur, par un texte écrit, ou parlé (dialogues de théâtre ou de cinéma). Il est aussi possible de définir des registres dans l'image (tableau, dessin, film). La notion est peu rigoureuse et à manier avec précaution, mais elle est à la mode dans le discours pédagogique, il faut donc la connaître.
ATTENTION : un texte peut être écrit dans plusieurs registres successifs. Par exemple, si l'on peut trouver dans "la laitière et le pot au lait" (La Fontaine) un registre comique, une bonne partie de la morale relève du registre lyrique.
Il n'existe pas de registre correspondant à un genre : ni réaliste, ni romantique, ni fantastique, ni poétique ...

REGISTRE LYRIQUE
effet produit thèmes moyens utilisés genres 
suscite l'empathie avec les sentiments du poète, de l'écrivain. * amour
* nature (exaltation de la)
* fuite du temps
* nostalgie et souvenir
* foi en une divinité
* mort
* présence de l'énonciateur : "je".
* utilisation de termes intensifs (adverbes, superlatifs).
* lexique des sentiments et des émotions (mais aussi tout lexique fortement connoté).
*  figures d'insistance : répétitions, anaphores, redondances, énumérations, hyperboles.
* figures d'analogie : personnifications, métaphores, périphrases (en général, laudatives).
* emploi de l'apostrophe, en particulier de la forme Ô, et d'interjections.
* souci de musicaliser le texte (rythmes, allitérations, assonances).
1. A l'origine : poésie versifiée, chantée,  accompagnée d'un instrument de musique (la lyre et/ou la flûte) chez Les Grecs et les Latins.
2. Toute poésie où des sentiments  sont exaltés.
3. Toute prose ayant les mêmes caractéristiques qu'un texte poétique et destinée à produire les mêmes effets (en particulier, dans les descriptions).

Lorsque le thème est la plainte, la déploration : on parlera de REGISTRE ELEGIAQUE
REGISTRE COMIQUE
effet produit thèmes moyens utilisés genres 
faire rire ou sourire, amuser, mais aussi dénoncer. * défauts des individus
* comportements sociaux
* vie quotidienne
* situations  fondées sur une discordance (que l'on retrouve aussi au niveau du langage)
* figures d'insistance : répétitions, anaphores, redondances, hyperboles.
* figures de construction : litote, antiphrase (en particulier dans le cas de l'ironie)
* jeux avec les niveaux de langue (familier, voire argotique / littéraire), avec les langages (jargons techniques, patois, mélanges de langues)
* jeux avec les sonorités
* jeux de mots (calembours, double sens)
* rythme rapide (des dialogues au théâtre ; utilisation de phrases brèves, de la construction parataxique - juxtaposition de phrases sans connecteurs- dans le récit)
1. farce
2. comédie



3. peut s'inscrire dans des images (dessins, peintures, photographies, films.)

Une définition de la comédie :
« La comédie est une imitation des erreurs courantes de notre vie, que l'auteur représente de la manière la plus apte à susciter le ridicule et le mépris, au point de retirer à tout spectateur le désir de sembler tel. » (Philip Sidney, 1554-1586)

Le registre comique peut prendre des formes multiples qui vont de la plus subtile, l'IRONIE, à la plus évidente, la CARICATURE qui grossit les traits jusqu'à les déformer.
BURLESQUE : comique fondé sur le renversement du registre épique (on raconte de manière triviale, prosaïque, des réalités nobles).
HEROÏCO-COMIQUE : comique inverse du burlesque (on raconte des choses infimes en utilisant le registre épique. Ex. la Fontaine dans "Les deux coqs" transforme un combat de basse-cour en guerre de Troie.)
HUMOUR : forme légère de l'ironie. Permet de mettre à distance des situations ou des événements difficiles à supporter. L'humour noir consiste à faire rire de situations tragiques.
SATIRE : forme agressive du comique, elle moque, en les caricaturant, des comportements (ou des personnages) que l'on veut dénoncer.
PARODIE : elle imite, en la changeant de registre  (ce qui va souligner et donc grossir les caractéristiques de cette oeuvre, c'est cette exagération qui suscite le rire), une oeuvre littéraire, voire picturale ou cinématographique.

REGISTRE TRAGIQUE
effet produit thèmes moyens utilisés genres

terreur et pitié
catharsis
le pouvoir, la mort, le mal sous toutes ses formes, la guerre, la folie * une situation sans issue: l'homme affrontant des forces qui le dépassent
* lexique de la mort, de la fatalité
* figures d'opposition : antithèses, oxymores
* niveau de langue littéraire
* le registre pathétique [tout ce qui est destiné à susciter l'empathie et à provoquer la compassion à l'égard d'un personnage]
A l'origine : le théâtre grec (Eschyle, Sophocle, Euripide)
ensuite, tout texte ou oeuvre d'art posant des questions relatives à la condition humaine.


Une définition de la tragédie que l'on peut étendre au tragique :
" la tragédie sombre dans le malheur  sous toutes ses formes ; elle sonde la perte, l'abandon, la violence, la folie, le vide de sens et surtout la mort, qui est son foyer." (Michael Edwards, 2005)


REGISTRE PATHÉTIQUE
effet produit thèmes moyens utilisés genres
susciter la pitié, l'attendrissement à l'égard d'un personnage.
la souffrance physique
le souffrance morale
l'injustice
la mort
* disproportion entre les protagonistes (fort contre faible, adulte contre enfant)
* disproportion entre le protagoniste et la situation (situation inhumaine atteignant des personnes ordinaires)
* phrases exclamatives, interjections
* champ lexical des émotions, des sensations, des sentiments

A l'origine, un des éléments de la tragédie. Le mot est emprunté par le latin (patheticus) au grec pathetikos (dérivé de pathos : souffrance) : ce qui émeut.
Tous les genres littéraires (comme les arts plastiques) peuvent utiliser le pathétique.

Au XVIIIe siècle, Marmontel distingue le pathétique direct qui consiste à manifester ou à représenter l'émotion même que l'on veut susciter et le pathétique réfléchi par lequel l'orateur ou le dramaturge provoque une émotion chez son public sans se servir lui-même des signes de cette émotion. Ce pathétique repose sur le sous-entendu mettant en opposition ce qui est raconté et ce qui est suggéré.
REGISTRE EPIQUE

effet produit
thèmes
moyens utilisés
genres

Etonner, effrayer, mais aussi susciter l'admiration.
Transmettre des valeurs collectives
guerres, exploits de toutes sortes
* une situation exceptionnelle (ou présentée comme telle)
* des personnages hors du commun
* une vision du monde simplifiée, manichéenne (le bien et le mal s'y opposent de manière claire et bien tranchée).
* pluriels ou singuliers collectifs (peuple, troupe, armée, communauté, etc.)
* tous les procédés de l'amplification : hyperboles, métaphores ennoblissantes ou dégradantes, énumérations, gradations, superlatifs, personnifications (des forces de la nature, par exemple)

A l'origine : les épopées (L'Iliade et L'Odyssée d'Homère en sont les modèles)
Ensuite, tout texte recourant aux mêmes procédés de mise en valeur d'une action. Zola en est friand.
Les reportages sportifs aussi.



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