5 août 1850 : Guy de Maupassant

coquillage


Maupassant, de son vivant, s'opposait farouchement à toute diffusion de portraits ou d'informations biographiques, "estimant que la vie privée d'un homme et sa figure n'appartiennent pas au public."
Mais comme nous ne sommes pas ses contemporains, il nous faut quelques repères pour définir le contexte dans lequel s'écrivent et s'accueillent ses oeuvres.
La naissance : le 5 août 1850, au château de Miromesnil (Tourville-sur-Arques, en Normandie).  La jeunesse de Maupassant s'écoule en Haute-Normandie : Fécamp, Etretat, Rouen, la campagne du pays de Caux. Il commence ses études, à Paris, où se trouve alors sa famille, au lycée Impérial (aujourd'hui, Henri IV),  mais en 1860, ses parents se séparant, sa mère retourne en Normandie et s'installe à Etretat dans une propriété nommée "Les Verguies" ; il sera mis en pension à Yvetot jusqu'à son exclusion lors de son année de rhétorique (première actuelle), en 1868, "pour irréligion et scandales divers". Il termine ses études secondaires (fin de rhétorique et classe de philosophie) au lycée Corneille de Rouen, puis s'inscrit à la faculté de droit de Paris.
Ces années normandes laisseront de nombreuses traces dans l'oeuvre où il dessine d'inoubliables portraits de personnages et use d'une langue paysanne savoureuse qu'il connaît bien. Il y  contractera aussi la passion de la mer et de la navigation, qu'il s'agisse de canotage sur la Seine (qu'il nomme toujours "la rivière") ou, plus tard, de navigation en haute mer sur les différents bateaux qu'il achètera ou fera construire.
A Rouen, il fréquente assidûment Louis Bouilhet et Flaubert qui est depuis toujours un ami de sa mère et comme il l'avait été du frère de celle-ci, Louis Le Poittevin, mort en 1848.
Maupassant, que taraude déjà le désir d'écrire, trouve en Flaubert un maître et un maître si exigeant qu'il ne s'estimera satisfait de son élève qu'en 1880, en lisant les épreuves de Boule-de-suif qu'il qualifie de "chef-d'oeuvre", passant du même coup du voussoiement au tutoiement dans ses lettres.
De 1870 à 1873, Maupassant est incorporé dans l'armée, et la guerre de 1870 sera à l'origine de nombre de ses nouvelles.
Démobilisé, il lui faut songer à travailler et il entre comme employé au Ministère de la Marine, où il restera jusqu'en 1878 avant de passer au Ministère de l'Instruction publique, qu'il abandonne progressivement, de congés avec traitement en congés sans traitement, pendant l'année 1880.

La préhistoire de l'écriture pour Maupassant n'est pas différente de celle de ses confrères: elle débute au collège par la rédaction de poèmes lyriques.
Et se poursuit par des tentatives  théâtrales. Le théâtre restant, à cette époque, une des voies considérée comme la plus rapide et la plus efficace vers la reconnaissance littéraire.
Mais ni la poésie, ni le théâtre ne sont vraiment son domaine. Son talent s'épanouira dans les contes dont il publie le premier en 1875, La main d'écorché (signé Joseph Prunier — pseudonyme sans doute imaginé à partir de la contraction des noms du personnage Joseph Prudhomme et de Henri Monnier, son créateur,  ce qui souligne déjà la dimension critique et ironique qui préside à leur rédaction), dans L'Almanach de Pont-à-Mousson.
En 1875, il fait la connaissance de Zola, Tourguéniev et Goncourt, chez Flaubert. Et, en 1876, se joint au groupe qui constituera "le groupe de Médan" (parce qu'ils se réunissaient dans la maison de Zola sise dans cette localité), tenants du naturalisme, vis-à-vis duquel Maupassant reste quelque peu distant comme le prouve sa préface, intitulée "Le roman",  de Pierre et Jean.
Ces nouvelles relations lui ouvrent les portes de la presse (revues et journaux). De 1875 à 1891, il publie trois cents nouvelles et rédige près de deux cents chroniques, inaugurées en 1876 par un hommage à Flaubert et poursuivies sans discontinuer, en particulier dans Le Gaulois, à partir de mai 1880 (on peut les lire à partir de cet index).
Maupassant est un auteur à succès, ce qui lui permet de vivre à son gré: souvent sur la côte d'azur (Cannes, Antibes); de voyager (en Afrique du Nord, en 1881 et 1885 ; en Italie en 1885 et en 1889 ; en Angleterre en 1886) ; de s'adonner à ses passions: la chasse, la navigation, la séduction.


Nadar, 1888

Photographie de Nadar que Maupassant l'autorise à vendre en 1891. D'autres portraits et
caricatures, ici.


BIBLIOGRAPHIE


1880 : Boule-de-suif  (publié dans Les Soirées de Médan)
1881 : La Maison Tellier  (premier recueil de nouvelles. C'est dans ce recueil qu'est publiée "Une partie de campagne", après une pré-originale dans La Vie moderne )
1882 : Mademoiselle Fifi (nouvelles)
1883 : Une vie (roman) - Les Contes de la bécasse (nouvelles)
1885 : Contes du jour et de la nuit (nouvelles) - Bel-Ami (roman)
1885 : Mont-Oriol (roman) - Le Horla (nouvelles)
1888 : Pierre et Jean (roman) - Sur l'eau (journal de voyage)
1889 : Fort comme la mort (roman)
1890 : Notre coeur (roman)

Mais dès 1885, sa santé se dégrade. Une syphilis a été diagnostiquée en 1877, maladie incurable à l'époque et qui évolue vers une paralysie générale finissant par toucher le cerveau. On ne sait pas encore vraiment ce qu'il en est et la "folie" apparaît comme indépendante de la maladie vénérienne, davantage imputable à l'hérédité. Il tente de se suicider pour échapper à ses souffrances le 1er janvier 1892 et sera interné dans la clinique du docteur Blanche où il meurt en 1893. Avant sa tentative de suicide, son dernier travail avait été un roman, L'Angélus, qui reste inachevé.

Le maître d'un genre : la nouvelle (ou conte, mot plus souvent utilisé au XIXe siècle)

La nouvelle se distingue du roman en proposant au lecteur un "pacte de lecture" reposant sur trois critères essentiels :
1. briéveté et unicité du récit. (il doit pouvoir être lu d'une seule traite : d'où peu de personnages, souvent stéréotypés ; une durée réduite avec si nécessaire résumés et ellipses ; une action unique     — récit d'une crise ou anecdote)
2. importance de la fin : la chute, la clausule, oriente la lecture de la nouvelle (et donc son écriture), cette fin doit produire un effet (en général fondé sur la surprise).
3. Les traces de l'oralité (le conteur s'adresse au lecteur et introduit ainsi une distance entre celui-ci et l'oeuvre. Le narrateur a souvent été témoin voire protagoniste de ce qu'il raconte)


A écouter : des textes de Maupassant, et, en particulier Les Contes de la Bécasse sur le site : Littérature audio.
ou encore sur ce site consacré à son oeuvre.
A lire : les contes de Maupassant, accessibles sur le site Maupassant.free


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