Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas, 1844-45

coquillage
 


A propos de Dumas, ce site contient
: 1. Une présentation des Trois mousquetaires (1844) - 2. Une biographie de Dumas - 3. Le Meneur de loups (1857) 4. Une présentation d'Antony (1831) -




La publication :

Le roman paraît d'abord en feuilleton (pratique courante au XIXe siècle) dans le Journal des Débats, du 28 août au 18 octobre 1844 (1re partie) et en 1845 (2e partie), mais il est loin d'être terminé comme en témoigne cet extrait d'une lettre à Maquet en juin 1845 : "Pour ne pas avoir trente-six récits, je mets dans la bouche de Bertuccio le récit de Caderousse. Je crois que nous n'avons pas besoin de presser les événements. Remettons à plus tard l'arrivée du major et celle du jeune-homme. Je crois qu'il y a une belle scène à faire le jour du dîner si Benedetto est là, car Benedetto reconnaîtra Villefort qu'il croit mort, et Mme Danglars. Bref, je crois qu'une causerie, à l'heure du dîner, ne ferait pas de mal. Voulez-vous venir dîner avec moi, nous arrêterons le second. Nous avons l'intérieur de Morel à faire, l'incident qui met Villefort en contact avec Monte-Cristo. Tout cela nous conduira avec la scène du major et de Benedetto à la fin du deuxième volume." (Cité dans "Le Quid d'Alexandre Dumas", éd. Robert Laffont, coll. Bouquins)
Pour sa rédaction, Dumas a donc  travaillé avec Auguste-Jules Maquet (1813-1886) qui a souvent collaboré avec lui.
Ils élaborent ensemble une série de plans (ils travaillent sur plusieurs romans à la fois), Maquet fait les recherches historiques (dans les Mémoires, les Chroniques),


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Affiche du film de David Green (1975)
Richard Chamberlain dans le rôle d'Edmond Dantès


 

il rédige une première version qu'il envoie à Dumas ; Dumas reprend, rédige et amplifie grandement la trame fournie par son collaborateur.
En 1845, le roman est publié en douze volumes chez le libraire Pétion et en 1846 par Lévy.
Le feuilleton, comme le roman en librairie, ont un succès si grand que Dumas se fait bâtir un château, en 1846, par l'architecte Hippolyte Durand dans un parc de neuf hectares, aménagé dans le style anglais, au Port-Marly (Yvelines).
Il sera contraint, toutefois, de le revendre en 1848, après la faillite de son théâtre.



Roman d'aventures, Le Comte de Monte-Cristo raconte une vengeance, celle d'Edmond Dantès, jeune marin de 19 ans, au début du roman, jeté en prison sur une accusation politique, parce qu'il a le tort d'être amoureux d'une jeune fille, Mercédès, qu'un autre veut épouser, son cousin Fernand. Le cousin est aidé dans sa mauvaise action par son complice, Danglars ; le procureur du roi, Villefort, s'empresse de le mettre au secret pour éviter que son père, bonapartiste impénitent, ne soit compromis. Enfermé au château d'If, au large de Marseille, Edmond Dantès y connaît un autre prisonnier, l'abbé Faria, qui entreprend son éducation et va, de plus, le mettre en possession d'un trésor immense ; c'est à lui aussi qu'il est redevable de son évasion.
Riche, Edmond, qui se fait appeler comte de Monte-Cristo, entreprend de se venger. C'est à suivre le comment de cette vengeance, plus de vingt ans après les événements initiaux que l'histoire nous invite. Ce temps est, bien sûr, nécessaire pour transformer Edmond, mais aussi pour que ses ennemis aient tout à perdre dans ce retour de celui qu'ils croient mort.



Le contexte historique :

Le roman débute par une date "Le 24 février 1815", c'est-à-dire à la veille des "Cent jours". Napoléon Ier a dû abdiquer le 4 avril 1814. Il est en résidence surveillée sur l'Ile d'Elbe (située entre la Corse et la côte italienne).  Louis XVIII règne en France, depuis ce moment-là. Cette période est appelée la première Restauration, car elle ramène les rois que 1791 avait chassés. Mais Napoléon n'a pas dit son dernier mot et prépare la reconquête du pouvoir. Le 1er mars 1815, il débarque à Golfe-Juan et les Français lui font un accueil enthousiaste. Il remonte sur Paris en rassemblant autour de lui tout ce que la France compte alors de bonapartistes (et ils sont nombreux). Dans le roman, si Dantès avoue n'avoir aucune opinion politique "Toutes mes opinions se bornent à ces trois sentiments : j'aime mon père, je respecte M. Morel et j'adore Mercédès.", le père de Villefort, M. Noirtier, est bonapartiste, M. Morel aussi qui, loin de se fâcher du détour par l'île d'Elbe de Dantès, lui demande des nouvelles de "l'Empereur".
Ce retour ne durera que cent jours. Napoléon sera défait à Waterloo par la coalition des rois européens et cette fois-ci, on l'enverra, à Sainte Hélène, une île volcanique, perdue dans l'Atlantique sud et sous domination britannique. Louis XVIII remonte sur le trône de France et c'est la seconde Restauration.



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Affiche du film de Robert Vernay (1942)
Pierre-Richard Willm dans le rôle d'Edmond Dantès



Les bonapartistes entrent, en quelque sorte, dans la clandestinité. Pendant un certain temps, jusqu'à ce que Louis Bonaparte fasse son coup d'Etat, en 1852, il y a une certaine convergence entre l'opposition républicaine et l'opposition bonapartiste.
Lorsqu'Edmond Dantès s'évade du château d'If, il est repéché le 28 avril 1829, Louis XVIII est mort, il a été remplacé par Charles X (roi depuis 1824). L'année suivante, une Révolution éclate qui conduit à un changement de roi, mais ne change pas véritablement la société.
Lorsque Dantès entame sa vengeance, en 1838, la situation est la suivante  : le roi est Louis-Philippe, depuis la révolution de 1830. C'est un temps dont les Villefort, Danglars et Morcerf (Fernand est devenu comte) sont des représentants littéraires assez proches de la réalité. Balzac ne dépeint pas cette époque d'une manière très différente : arrivisme, affairisme, égoïsme, règne de l'argent.
Ce que Dumas met en scène dans son roman n'est pas seulement une vengeance individuelle, et son succès le prouve. Il donne une sorte de compensation à tous ceux que la Restauration a spolié de leurs espoirs en une société plus juste, plus égalitaire, qui aurait donné leur chance à ceux qui le méritent quelle que soit leur origine sociale.



De 1907 à 1997 , il y a eu 34 adaptations cinématographiques de ce roman.

A voir : les couvertures de l'édition Nelson (vers 1930) sur le site consacré à Dumas.
A lire : un article de Umberto Eco, "Eloge de Monte-Cristo" dans De Superman au surhomme, éd. Grasset, 1993.



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