21 novembre 1694 : François-Marie Arouet, dit Voltaire

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A propos de Voltaire, ce site contient
: 1. Une présentation de Candide, 1759 - 2. De l'horrible danger de la lecture, 1765 - 3. Un extrait de l'article "homme" (Questions sur l'Encyclopédie, 1771) - 4. Un extrait de l'article "Guerre" (Dictionnaire philosophique portatif, 1774) - 5. Une illustration de Moreau le jeune pour le chapitre III de Candide - 6. Une préface de Calvino à une édition italienne, 1961, de Candide. - 7. La Princesse de Babylone (1768) -





     Si François-Marie Arouet est né ce 21 novembre 1694, à Paris, dans une famille de bonne bourgeoisie en pleine ascension sociale, Voltaire, lui, ne surgira que 24 ans plus tard, en 1718.  Il le fait, avec un sens instinctif, sans doute, de la mise en scène: sortant de la Bastille (onze mois d'emprisonnement pour des vers satiriques contre le Régent), il fait triompher sur la scène du théâtre français, une tragédie: Oedipe et un nom : monsieur de Voltaire.  Ce jeune homme de 24 ans, admirateur des classiques du XVIIe siècle, en délicatesse avec le pouvoir, se lance dans la course à la gloire avec le thème du parricide, lui, qui se voulait si peu le fils de son père, qu'il s'inventa une autre paternité (celle d'un mousquetaire, un peu poète, monsieur de Rochebrune), déplaça sa date de naissance en février 1694, et se fabriqua un nom qui ne fût qu'à lui, anagrammatique certes, mais doté d'une particule qui fait un joli effet : Monsieur de Voltaire.
Ces premiers pas contiennent toutes les promesses : les démêlés avec le pouvoir ne cesseront jamais, le succès du dramaturge ne se démentira pas, Paris le fêtera encore, en 1778, en une véritable apothéose,  l'année de sa dernière tragédie, Irène, et de sa mort, et Voltaire est bien fils de lui-même et de ses oeuvres.
Poète, historien, dramaturge, philosophe, Voltaire s'intéresse à tout, et travaille à la mesure de ses ambitions.
Comme il est assez habituel, les admirations de ses contemporains (pour son théâtre, pour sa poésie, dont l'épopée La Henriade, 1728) ne sont plus celles de la postérité qui leur préfère ses contes et ses oeuvres philosophiques. Reste l'admiration.
Jusqu'en 1759, la vie de Voltaire est un perpétuel déplacement, à commencer par son séjour anglais  (1726 - 1728), conséquence d'une dispute avec le chevalier de Rohan, lequel le fait bastonner, sans que le roturier puissse obtenir justice contre le noble. Menacé de La Bastille, une fois de plus, Voltaire prend le large et va découvrir ce qu'il en est d'une monarchie constitutionnelle.



Voltaire, Quentin-Latour

portrait de Voltaire, 1735, pastel de Quentin-Latour.
(il sera reproduit souvent, sous forme de gravure, en particulier)

 Il apprend l'anglais. En 1727, il publie son premier texte dans cette langue, Essay upon epick poetry et son premier grand ouvrage, en prose, les Lettres Philosophiques, est d'abord publié en anglais, Letters concerning the english nation (1733). Sa réception anglaise ne rencontrera pas les difficultés de la publication en français (1734) : le Parlement condamne les Lettres au bûcher comme "contraires à la religion, aux bonnes moeurs et au respect dû aux Puissances" (on brûle beaucoup les livres au XVIIIe siècle, et les hommes, à l'occasion). Il ne s'agit pas de lettres au sens strict, mais d'une succession d'essais dont le 25e et dernier (constitué de 57 articles), surtout, a irrité ces messieurs du Parlement. En effet, Voltaire y attaque Pascal parce qu'il "dit éloquemment des injures au genre humain" en y affirmant :  "J'ose prendre le parti de l'humanité contre ce misanthrope sublime ; j'ose assurer que nous ne sommes ni si méchants ni si malheureux qu'il le dit" et en y défendant un point de vue qui est celui des libertins, au sens que le mot avait au XVIIe siècle plus qu'au XVIIIe.
De retour en France, Voltaire va rencontrer, en 1733,  celle qui l'accompagnera pendant quinze ans, Emilie du Châtelet. Avec elle, il habitera le château de Cirey, en Lorraine : on y fait beaucoup de science et de philosophie ; Emilie traduit Newton, Voltaire se plonge dans la philosophie, ce qui ne l'empêche ni de publier, ni de voyager.  Mais Emilie meurt, en 1749, des suites d'un accouchement (Voltaire n'y est pour rien. Emilie s'était entichée de Saint-Lambert que Voltaire rendra férocement responsable de cette mort). L'écrivain rentre à Paris, puis part pour Berlin où Frederic II l'invite (ils correspondent depuis 1736 et continueront toute leur vie en dépit de l'expérience difficile de leur rencontre. En 42 ans, ils auront échangé 800 lettres).
La cour de Prusse est tout aussi décevante que la cour de France dont il avait fait l'expérience entre 1744 et 1749, protégé par les d'Argenson (anciens condisciples de Louis le Grand où il a fait ses études) et Madame de Pompadour. Etre historiographe du roi (1745) , élu à l'Académie française (1746), n'avait pas vraiment protégé Voltaire des nombreux ennemis qu'il se fait aussi bien par ses oeuvres, que par ses attitudes : trop libre, trop indépendant, trop insolent, et peut-être trop spirituel pour perdre l'occasion d'ironiser, ce qui est rarement apprécié par les Grands.
En 1747, il publie son premier conte "Memmon, histoire orientale", première version de Zadig (1748).
Voltaire vient d'inventer le conte philosophique. Brève histoire aux personnages dessinés à grands traits, le conte emprunte au merveilleux, mais aussi au burlesque, au picaresque, pour donner à percevoir le monde, l'homme, leurs interactions, et poser les questions essentielles qui sont celles du siècle, qu'elles soient scientifiques, philosophiques ou morales.




Emilie du Châtelet

Emilie du Châtelet (1706 - 1749), portrait par Marianne Loir (vers 1715 - vers 1779) - Le compas semble faire partie des attributs que l'on attache à Mme du Châtelet, que nous connaissons d'elle le contient aussi.


En 1755, Voltaire achète la propriété des "Délices", en Suisse, où il s'installe avec sa nièce, Mme Denis (qui est aussi sa maîtresse, depuis 1744), puis en 1758, celle de Ferney, voisine (à 8 km du centre de Genève), mais en France.
Il y vivra le reste de sa vie en y recevant tous les "intellectuels" (comme nous dirions aujourd'hui) de l'Europe. C'est de là qu'il lance tous ses combats.
Le Traité sur la tolérance (1763) contemporain de la lutte pour la réhabilitation de Calas (un dossier sur les affaires Calas et Sirven est disponible chez Magister), puis le Dictionnaire philosophique portatitf (1764), machine de guerre contre les religions, prônant un déisme (ou théisme) reconnaissant un Etre surpême (que chacun est en droit de nommer comme il veut) avec lequel chacun peut communiquer sans intermédiaire. Voltaire, qui n'aimait guère Rousseau, a toujours, cependant, avoué son admiration pour "La profession de foi du vicaire savoyard" où l'auteur de L'Emile développe sa thèse d'une religion naturelle (pour mieux comprendre ce qui oppose Voltaire et Rousseau, allez sur Magister).
Il ajoute, entre 1770 et 1772, les Questions sur l'Encyclopédie dont on peut lire le texte à la BnF, dans une édition de 1829 (qui rassemble Dictionnaire philosophique portatif et Questions sur l'Encyclopédie), moins le volume 31 qui n'est pas accessible en ligne : 1 (A-Arbre à suif) , 2 (Arc - Chaîne des êtres créés), 3 (Chaînes ou génération des événements- Ecrouelles) 4 (Génération - Langues), 5 (Prophètes - Zoroastre) .
En même temps, Voltaire continue d'écrire ses contes, dont Candide (1759) est sans doute le plus beau fleuron, à inonder Paris de pamphlets, à entretenir une abondante correspondance. Aux yeux de ses contemporains, il est devenu le chef de file de ce qui apparaît comme un parti, celui des philosophes.
Comme Candide, il cultive son jardin, et développe l'agriculture dans ses propriétés : assèche des marais, défriche,  plante ; développe l'élevage. Ce comportement de propriétaire terrien n'a rien de surprenant chez un homme qui s'était très tôt bâti une fortune par la spéculation financière.  Le travail, sur tous les plans (matériel autant qu'intellectuel) semble avoir été toute sa vie, la ressource surprême, comme il le fait dire au vieillard, au dernier chapitre de Candide : "Le travail éloigne de nous trois grands maux: l'ennui, le vice et le besoin."
Sans doute d'une excessive sensibilité, Voltaire ne s'est jamais complu dans les jérémiades : quand le monde lui paraît insupportable, il prend sa plume et combat. Nous aimons beaucoup l'insolence et l'agressivité voltairienne, c'est un tonique pour tous les temps.
Voltaire revient à Paris en 1778, c'est une apothéose. Les Parisiens lui font cortège, on joue sa dernière pièce, Irène, en mars. Il meurt le 30 mai 1778.
A sa mort, l'impératrice Catherine II achète l'intégralité de sa bibliothèque (plus de six mille ouvrages), conservée depuis à Saint-Pétersbourg.
En 1791, on transporte, en grande pompe, ses restes dans le Panthéon. Sur son catafalque, s'inscrivait la vision que les révolutionnaires avaient de lui : "Il combattit les athées et les fanatiques. Il inspira la tolérance. Il réclama les droits de l'homme contre la servitude et la féodalité.", puis "Poète, Historien, Philosophe, il agrandit l'esprit humain, et lui apprit qu'il doit être libre." Enfin, "Il défendit Calas, la Barre et Montbailli"





Ferney



Le château de Ferney, tel qu'on peut le visiter actuellement. Il est, depuis 1999, propriété des Monuments historiques.


A découvrir : les aventures du coeur de Voltaire sur le blog de Gallica.


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